Comprendre la variabilité des propriétés des poussières d’Afrique du nord selon la nature des zones sources

Les zones arides et semi-arides au Sahara et au Sahel en Afrique du nord représentent la source plus intense de poussières à l'échelle globale. Les émissions se localisent au sein de grandes zones source en Mauritanie, dans le sud et l'est de la Lybie, à la frontière entre l'Egypte et le Soudan, et dans la dépression de Bodélé au Tchad, ainsi que par l’érosion des terrains sahéliens mis en culture, donc remaniés, sous l’effet des systèmes convectifs de méso-échelle. Ces émissions sont caractérisées par cycles saisonniers prononcés en lien avec les phénomènes météorologiques qui en pilotent. Ainsi, les émissions sahariennes sont maximales au printemps et en été, alors que les émissions depuis le Sahel sont caractérisées par un cycle saisonnier été-hiver (saisons humide-sèche), selon la position de la zone de convergence intertropicale (ZCIT) et le développement de la Mousson Africaine.


La composition des sols parents, et l’intensité des phénomènes météorologiques, induisent une forte diversité dans les propriétés physico-chimiques des aérosols désertiques, et donc dans leurs propriétés optiques.


Les programmes AMMA, DODO, GERBILS, et FENNEC ont permis d’accéder à ces zones sources. Ainsi, nous avons pu mettre ensemble un jeu de plusieurs centaines d’échantillons de terrain, récoltés au sol et en avion, pour caractériser la composition minéralogique mais également les paramètres de forme de ces aérosols issus de zones sources importantes mais difficiles d’accès telles que la dépression de Bodélé, la Mauritanie, et le Sud Algérien.


Ainsi, nous avons obtenu une « cartographie » étendue de la teneur et la minéralogie des oxydes de fer, qui déterminent les propriétés d'absorption des poussières dans le spectre visible, et qui, pour les poussières du nord de l’Afrique, représentent entre 2 et 4% de la masse totale des poussières, et entre 45 et 70% du fer total (figure de gauche). La figure de droite illustre par contre la minéralogie des oxydes de fer dans ces régions, indiquant que, pour les aérosols du nord de l’Afrique, c'est la goethite, et non pas l'hématite, l’oxyde de fer le plus abondante. Selon les données de spectroscopie disponibles à ce jour, la goethite absorbe plus faiblement le rayonnement visible que l'hématite. Notre résultat est donc en accord avec les nombreuses observations qui revoient à la baisse les propriétés d’absorption des poussières dans ce domaine spectral.

 

Gauche : variabilité des teneurs en fer et en oxyde de fer pour des aérosols désertiques d'origine Saharienne et Sahélienne ; Droite : minéralogie des oxydes de fer pour des aérosols désertiques d'origine Saharienne et Sahélienne. Adapté depuis Formenti et al. (2014).